Pendant sa résidence à 47-2, Agnès Prévost, artiste plasticienne s’est intéressée aux liens existants entre corps des plantes et corps des femmes à travers une recherche et des rencontres avec les savoirs et les pratiques médicinales, notamment en Bourgogne-Morvan.
Quelles représentations des corps des plantes et des femmes innervent les pratiques médicinales ? De la cueillette au soin, « avons-nous perdu aujourd’hui ce contact étroit du corps avec les plantes ? » (Capucine Crosnier).
Encore au siècle dernier, dans les familles de Bourgogne et Morvan, les femmes étaient détentrices et transmettrices de ces savoirs et pratiques. En Europe, la connaissance des femmes en matière médicinale étaient donc très ancienne, et leur place centrale dans le soin des corps et des maux spécifiquement féminins, aux différents âges de la vie.
La rencontre de deux herboristes installées en Bourgogne ancre le projet d’Agnès Prévost dans l’observation des gestes et outils de la cueillette. Le·a cueilleur·se, en particulier de plantes sauvages, cueille dans un contact actif avec la plante dans son milieu, son énergie, ses cycles. Contact vient de cum : avec et tactus : touché (Littré). Le sens du toucher est essentiel dans la pratique herboriste. Il l’est également dans l’acte de soin.
Parmi les contenants de récolte se trouvent des draps et sacs de coton récupéré et transformé, faits à la main. Des formes en apparence simples, en fait très ajustées aux plantes cueillies et aux corps du·de la cueilleur·se. Agnès Prévost s’est intéressée à ces contenants utilisés par les herboristes et en a reproduit différentes formes. Puis, à partir d’une recherche sur l’action chimique des substances tinctoriales qui composent certaines plantes dites « des femmes », elle les a teintes à partir de fleurs d’achillée millefeuille et de feuilles de noyer récoltés à Cosne-sur-Loire. D’un vêtement porté, la couleur peut marquer le pouvoir. Agnès Prévost modifie celle des poches de cueillette pour réverbérer les corps et les forces des plantes, des cueilleuses et du soin.
Encore aujourd’hui, les trois quarts des médicaments conservent une origine végétale. Les molécules tinctoriales que contiennent les plantes sont défensives pour elles-mêmes. Dans le cas de soins usant certains tanins et d’autres polyphénols en particulier, ce sont bien des forces végétales que nous transférons des plantes vers nos propres corps.
Photographies : ©Agnès Prévost, tous droits réservés.