Clara Denidet
artiste
« L’intérêt que je porte à ce que l’objet dit, m’enseigne des choses. C’est une forme d’attention décentrée ; orientée vers des manières de "faire avec". Loin de l’issue résignée, l’acte de composer, de bricoler tient du magique.
Quand il est employé à faire ce pourquoi il n’a pas été prévu, à être ce qu’il n’est pas, quand il devient un symbole, un outil, un langage ou un témoin, quand il est transmis, usé, transformé, l’objet est une prise.
Chacun.e déploie face au chaos une foule de tactiques quotidiennes, habitudes et rites qui fondent nos manières d’habiter un environnement. (La construction d’une charpente solide comprend le fait de "toucher du bois".)
Mon travail tient autant de la recherche anthropologique que du bricolage empiriste. Je cherche dans la cohabitation de ces deux terrains des accès à ces savoirs internes et collectifs, ceux qui se logent dans l’usage de la langue, de l’objet, du quotidien… Ceux qui s’apprennent et se fabriquent. Tout ça demande un effort d’attention, d’indiscrétion. L’œil cherche sans cesse le reflet d’une chose dans une autre, navigue de la marge au centre. Le monde ordinaire, la micro-histoire deviennent par là des terrains de recherche où l’intuition se ferait outil de mesure, l’art une science inexacte. Il s’agit aussi de présumer des liens entre les choses, de parier sur leurs échos comme on s’essayerait à jeter des sorts.
La rencontre d’un matériau, d’une image, d’un usage me pousse à mettre en œuvre, à confectionner des objets et installations dans des rapports de proximités. L’échelle, le collage de symboles et de sens tendent à construire des formes qui dans le fond, ne nous sont pas étrangères. Alors on se demande ce qui les a amenées à être et ce qu’elles vont devenir, on se questionne sur leurs fonctions hypothétiques. Mes travaux se placent discrètement entre l’outil, le support de connaissance, et le témoin d’expériences empiristes. »
Clara Denidet